Littérature française

L’éternité n’est pas de trop

L’éternité n’est pas de trop de François Cheng, 2002


C’est bouleversée que j’ai refermé ce roman.

Émue par cette histoire magnifique.
Éblouie par l’écriture de François Cheng.
Touchée en plein cœur par sa finesse et sa sensibilité.
Admirative de cet auteur qui n’a appris le français qu’à l’âge adulte.

Ai-je besoin d’en dire plus pour vous donner envie de vous précipiter sur ce livre si vous ne l’avez pas déjà lu ?

Si pour vous, lire, c’est voyager dans l’espace et dans le temps, foncez : François Cheng vous transporte en Chine au XVIIè siècle.
Si pour vous, lire, c’est éprouver des émotions, foncez !
Si pour vous, lire, c’est vous attacher à des personnages, foncez !
Si pour vous, lire, c’est goûter le plaisir d’un style unique, foncez !

Ai-je besoin d’en dire plus ?
Je ne pense pas. Et ne comptez pas sur moi pour vous dévoiler l’histoire : partez à sa découverte !
À la découverte d’un ouvrage que je place très haut dans mon panthéon littéraire.
Un de ceux qui me font dire : « Quelle merveille que la littérature ! »

Ce livre est un bijou, François Cheng est un orfèvre !

Littérature russe

Ce n’était que la peste

Ce n’était que la peste de Ludmila Oulitskaïa, 1988


« Ce livre raconte l’histoire d’une épidémie de peste qui s’est déclarée à Moscou en 1939, et qui a été stoppée grâce aux efforts du service d’État le plus effroyable et le plus puissant qui soit – les organes de la sécurité d’état de l’URSS. Il s’agit sans doute du seul et unique cas dans toute son histoire où cette institution féroce et impitoyable a travaillé pour le bien de son peuple, et non dans le but de le terroriser et de l’anéantir. »

Voilà un livre original en diable, tant sur le fond que sur la forme.
Ludmila Oulitskaïa a écrit son texte comme un scénario : des indications sont données avant chaque « scène » mais le reste est écrit comme un roman classique. C’est un peu surprenant au début, mais on s’y habitue très rapidement et la lecture est très agréable.
À partir de faits réels (l’épidémie de peste et la façon dont elle a été jugulée), elle a bâti une histoire avec des personnages fictifs et à travers eux nous fait prendre conscience de la férocité du NKVD (Commissariat du peuple aux affaires intérieures) qui broie les hommes sans états d’âme puisqu’ils n’ont aucune valeur individuelle.
Elle montre bien la mainmise de l’état dans tous les domaines de la vie publique… et privée. Les citoyens n’ont pas d’existence propre et sont à chaque instant à la merci d’un arbitraire contre lequel il serait vain de se battre.

Ludmila Oulitskaïa écrit de façon simple, sèche et sans fioritures, tout en y incluant une dose d’ironie bienvenue pour alléger un fond oppressant.
Le titre lui-même est révélateur de cette façon de procéder : dans le régime stalinien, être arrêté n’augure rien de bon et chaque personne interpelée et mise à l’isolement va craindre le pire… mais « Ce n’était que la peste »… ouf !

Si la peste dont il est question ici était d’une dangerosité sans égale (taux de létalité de 100%), les mesures drastiques prises ont certes été souvent inhumaines mais elles ont permis de juguler rapidement ce qui aurait pu être une épidémie monstrueuse.

L’ouvrage date de 1988 mais n’a été publié en France qu’en 2020 alors que le monde connaissait une tout autre épidémie.
Curieuse coïncidence temporelle !
Mais le covid, contrairement à la peste, est inoffensif pour l’immense majorité de la population et ne provoque que des symptômes comparables à ceux engendrés par l’habituelle cohorte de virus hivernaux. Très désagréables parfois, mais absolument pas dangereux.
Les mesures prises (confinements, vaccinations forcées de tous sans aucune distinction, avec un produit dont on ne connaît pas les effets à long terme) pendant la « crise du covid » ont été délirantes et la gestion de l’état n’a rien à envier au totalitarisme soviétique.
À méditer pour que collectivement nous ne nous laissions plus imposer ce genre de délire.

Littérature française

Le guerrier de porcelaine

Le guerrier de porcelaine de Mathias Malzieu, 2022


Juin 1944.
Après la mort de sa mère, le jeune Mainou est envoyé en Lorraine dans la ferme de sa grand-mère. C’est là qu’il va vivre les derniers mois de la guerre.
Mathias Malzieu, fils de celui qui fut ce petit garçon, retrace cette période marquante de l’enfance de son père dont il fait le narrateur du récit.

J’ai trouvé ce livre plein de fraîcheur et très touchant.
Sans mièvrerie aucune, l’auteur a su retranscrire à merveille la magie et le merveilleux propres à l’enfance, quelles que soient les circonstances.
Le petit Mainou est candide et terriblement attachant. Marqué par la perte de sa maman, le voilà contraint de s’habituer à un nouvel environnement, à de nouvelles personnes, à de nouvelles conditions de vie.
Les restrictions de liberté en zone occupée ne sont pas vraiment compréhensibles pour un petit garçon dont l’imagination débridée va inventer tout un tas de choses plus farfelues et amusantes les unes que les autres.

Mathias Malzieu a parfaitement réussi à se mettre à hauteur d’enfant, et les réflexions qu’il met dans la bouche de Mainou sont à la fois drôles et très crédibles.
Les personnages secondaires ne sont pas en reste, la tante Louise et l’oncle Émile en particulier sont vraiment savoureux.
C’est un ouvrage très personnel que l’auteur nous offre ici, un livre à la fois drôle, tendre, fantaisiste, sérieux et très humain.
Et quel bel hommage à son père !

Un texte que j’ai lu avec un grand plaisir.

Littérature française

Comment je suis devenu stupide

Comment je suis devenu stupide de Martin Page, 2000


« Ceux qui pensent que l’intelligence a quelque noblesse n’en ont certainement pas assez pour se rendre compte que ce n’est qu’une malédiction. »
Boutade ? Provocation ?
Non, réalité !

Antoine est intelligent, et c’est un problème pour lui car il se sent déphasé.
Il ne pense pas comme les autres, ne vit pas comme les autres, ne s’intéresse pas aux mêmes chose que les autres.
Il se sent inadapté, sa vie n’a pas de sens.
Il veut que cela change et à vingt-cinq ans prend le taureau par les cornes : il prend « la résolution de couvrir son cerveau du suaire de la stupidité ».
Comme il ne manque pas d’imagination, il fourmille d’idées pour parvenir à ses fins et le récit de ses différentes tentatives est hilarant.

Martin Page nous offre un roman jubilatoire et plein de fantaisie mais ce serait dommage de s’arrêter à ce seul aspect car derrière ces péripéties réjouissantes se forme en creux le portrait de notre société… et celui-ci n’a vraiment rien de réjouissant !

Je ne raconte rien de plus pour laisser à ceux qui le souhaitent le plaisir de la découverte, mais sachez qu’il faut aimer l’humour et l’ironie pour apprécier ce texte terriblement original.

Tout au long de ma lecture j’ai pensé au film Idiocracy de Mike Judge qui nous présente une société futuriste dans laquelle l’humanité est devenue totalement stupide.
Futuriste ? Peut-être pas… et c’est ce qui fait d’Idiocracy un film à la fois hilarant et terrifiant.
Les gens abêtis par les écrans, délaissant toute forme de culture et de réflexion… est-ce vraiment là une société futuriste ?
Je ne le pense pas, et l’auteur non plus puisque l’une des premières mesures que prend son personnage dans sa quête de la stupidité est de se débarrasser de ses livres et de planter au beau milieu de son salon une télévision géante.
Quel symbole !

Pour conclure, je ne peux m’empêcher de citer Groucho Marx qui avait dit, avec tout l’humour qui le caractérisait :
« Je trouve que la télévision est très favorable à la culture. Chaque fois que quelqu’un l’allume chez moi, je vais dans la pièce à côté et je lis. »

Une lecture follement drôle… mais pas seulement…

Littérature française

Florida

Florida d’Olivier Bourdeaut, 2021


« Ma mère s’emmerdait, elle m’a transformée en poupée. Elle a joué avec sa poupée pendant quelques années et la poupée en a eu assez. Elle s’est vengée. »
La vengeance est un plat qui se mange froid, et Elizabeth a patiemment ourdi la sienne pour la balancer glacée à la figure de ses parents, particulièrement à celle de sa mère.

Florida, c’est l’histoire d’une mini miss.
L’histoire d’une petite fille à l’enfance saccagée.
L’histoire d’une vie entière saccagée.
L’histoire d’une vengeance magistrale.

Vous avez certainement entendu parler des concours de mini miss.
Ces concours vomitifs venus des États-Unis où des fillettes dès l’âge de trois ans (oui, vous avez bien lu !) défilent devant des jurys en tenues affriolantes, maquillées à outrance et se trémoussant d’une façon plus que suggestive et totalement déplacée compte tenu de leur jeune âge.
« Il suffit de taper mini-miss dans le moteur de recherche pour se régaler jusqu’à la nausée » écrit Olivier Bourdeaut : si vous n’avez jamais vu d’images de ces dingueries, allez-y !

Elizabeth fait partie de ces mini miss.
C’est une victime.
Victime des tordus qui osent organiser ce genre de concours, et de sa mère qui, voulant vivre la réussite à travers sa fille, ne recule devant rien et lui fait subir tout un cortège de choses invraisemblables.
L’auteur s’est manifestement régalé et a laissé libre cours à une imagination débridée. Son roman est plein d’humour, décalé et caustique à souhait.

La haine et le désir de vengeance sont de puissants moteurs, Elizabeth en est une excellente illustration.
Dès qu’elle se libère de ce monde délirant et malsain, elle n’a qu’une idée en tête : se venger.
Irréversiblement marquée par une enfance qui lui a été volée, elle va utiliser toute son énergie pour atteindre son but. D’autant plus que, comme elle l’écrit au début de son texte : « Je ne pardonne pas. Je ne pardonnerai jamais. »
Je la comprends ! Si j’avais subi ce que sa mère lui a fait subir, je n’aurais pas pardonné.

Florida est un livre choc, drôle et plein d’ironie.
J’ai ri aux larmes par moments, je me suis indignée à d’autres. Parfois, j’ai fait les deux en même temps.
En tout cas, j’ai éprouvé de la compassion pour Elizabeth de la première à la dernière page.
Qu’un roman procure autant d’émotions, voilà ce que j’adore !
Florida est un ouvrage satirique formidable, un immense plaisir de lecture.

PS : sur le thème des mini miss et dans un genre complètement différent, je vous recommande Petite soeur, mon amour de Joyce Carol Oates.

Littérature française, Montagne

Une ascension

Une ascension de Pauline Desnuelles, 2023


Pauline Desnuelles aime la montagne et cela se sent dans chaque ligne de son roman.
Avec une écriture simple en apparence mais précise et très agréable à lire, elle nous offre deux beaux portraits de femmes.

Aurore, journaliste, mène des recherches sur Marguette Bouvier, pionnière qui a effectué la première descente du mont Blanc à skis.
Par-delà le temps, la vie de Marguette va entrer en résonnance avec celle d’Aurore et la dame du passé va insuffler son énergie à celle du présent.

J’ai aimé ce récit à plusieurs voix, j’ai aimé ce voyage dans le temps, j’ai aimé me balader en montagne avec les différents personnages.
J’ai aimé ce texte à la fois doux et fort, à la fois intimiste et universel.
J’ai aimé ce livre, tout simplement !

Littérature française

Place du Paradis

Place du Paradis de Xavier-Marie Bonnot, 2024


« Nous n’avons pas d’avions pour vous bombarder comme vous nous bombardez. Nous avons des hommes qui aiment la mort comme vous aimez la vie. »
[Extrait de l’éditorial de la revue Dar-al-Islam, « Qu’Allah maudisse la France », de janvier 2015]
« Des hommes qui aiment la mort comme vous aimez la vie » : quelle terrible expression ! Quelle violence, quelle haine dans ces quelques mots !
Une promesse de mort claire et glaçante.
Des hommes et des femmes qui aiment la mort : voilà le sujet de ce roman.
Un immense merci à Babelio et aux éditions Récamier grâce à qui j’ai eu la chance de lire cet ouvrage dans le cadre d’une rencontre marquante avec Xavier-Marie Bonnot.

Place du Paradis est une fiction. Mais combien de Fabien et Marie, partis en Syrie sous la plume de l’auteur, existent dans la vraie vie ?
Combien de gamins perdus adhèrent chaque année au discours djihadiste ?
Combien de paumés n’ont plus que cet idéal mortifère dans leur vie ?
Combien sont prêts à mourir ?

Ce livre fait froid dans le dos parce que c’est une fiction pas fictive du tout.
Le sujet du terrorisme fait peur : chacun sent qu’il peut en être victime à tout moment.
Le sujet de l’embrigadement fait peur : chacun a lu ou entendu des témoignages de parents dont un enfant est parti pour un voyage sans retour.

Tant de vies gâchées !
Comment en arrive-t-on là ?
Comment un jeune, qui a tout l’avenir devant lui, en vient à ne plus embrasser qu’un idéal de mort et de destruction ?
Le personnage de Marie est touchant et ne peut qu’émouvoir le lecteur. La jeune femme a ému Xavier-Marie Bonnot tandis qu’il écrivait, mais cela ne l’empêche pas de garder sa lucidité et d’affirmer clairement durant la rencontre : « Je sais que celui qui rejoint l’état islamique, c’est mon ennemi : je n’ai pas d’états d’âme par rapport à ça. »
J’ai vraiment apprécié cette déclaration faite sans aucune hésitation, et je la partage entièrement.
Pour enfoncer le clou, il ajouta d’une voix toujours aussi assurée : « Difficile de ne pas avoir d’empathie, mais ces gens-là ne sont pas excusables. Ils ont vu Mohamed Merrah dans les médias, ils savent ce qui se passe en Syrie. Ils savent à quoi mène l’idéologie de l’état islamique. »
C’est on ne peut plus clair, et ces propos font un bien fou, à l’heure où certains politiciens tergiversent, cherchent des excuses et refusent de nommer le réel.
Allez, une dernière petite citation : « Le Hamas ? ce sont des terroristes. »
Merci monsieur Bonnot de rappeler ces évidences… qui ne sont pas évidentes pour tout le monde, hélas.

Cette fermeté dans les propos et les convictions n’empêche pas la réflexion, bien au contraire. Mais c’est une réflexion lucide.
En tant que parent, on ne peut pas rester insensible à toutes ces histoires que l’on peut lire ici ou là, on ne peut que compatir au désarroi de ceux dont les enfants sont partis, et on ne peut que s’interroger sur les raisons qui conduisent des jeunes sur ce chemin de mort.
Et se pose forcément la question essentielle de la prévention…

Xavier-Marie Bonnot maîtrise parfaitement son sujet, et la rencontre a été passionnante de bout en bout car il a parlé de son livre, bien sûr, mais aussi de tout le contexte géopolitique qu’il connaît sur le bout des doigts.
Je serais restée des heures à l’écouter !
Place du Paradis est très habilement construit et le lecteur avance petit à petit vers la compréhension d’une réalité complexe.
Très bien écrit, c’est un roman bouleversant, d’autant plus qu’il est ponctué d’extraits de témoignages faits lors du procès des attentats du 13 novembre 2015. Témoignages qui rappellent au lecteur que ce ne sont pas de doux rêveurs qui sont partis en Syrie mais bel et bien des assassins en puissance.
Place du Paradis est une lecture qui bouscule et prend aux tripes.
Une lecture que je ne suis pas près d’oublier !

Place du Paradis ? Cette place existe réellement, mais Daesh l’a transformée en enfer.

Littérature française

Vladivostok

Vladivostok de Cédric Gras, 2011


Vous savez certainement que Vladivostok est une ville de Russie, mais sauriez-vous la situer sur une carte ?
Le nom de Vladivostok évoque le froid, le lointain, l’inhabitable presque.
Alors ?
Faites-vous partie de l’immense majorité de ceux qui la placent tout au Nord, en Sibérie ?
N’ayez pas peur de l’avouer… c’est ce que je faisais aussi… avant cette lecture.

Voilà l’une des premières choses que j’ai apprises en lisant cet ouvrage : Vladivostok est à l’extrémité Est de la Russie.
Et ce n’est que la première des découvertes que j’ai faites dans ce livre passionnant à lire et très original !

« Il faut vivre ailleurs pour devenir autre. Il faut passer du temps avec les éléments, avec la terre, avec les gens. […] S’arrêter, s’imprégner d’un lieu, se l’approprier, en connaître les odeurs et la couleur du ciel. Et ce même si le temps est long dans les steppes de Sibérie et dans les forêts d’Extrême-Orient. »
Cédric Gras a vécu quatre années dans ces contrées lointaines, il a appris à parler parfaitement le russe et à connaître de l’intérieur les habitants de ce pays si singulier.

Une préface fort intéressante nous plonge immédiatement dans l’ambiance. Ça tombe bien, elle s’intitule « L’infusion géographique ».
Ce titre me fait immédiatement penser à mon cher Sylvain Tesson ; je tourne les pages… bingo, ces mots sont bien les siens !
Je suis heureuse de l’avoir reconnu rien qu’avec ces trois mots, et encore plus heureuse de ce que je lis : sa préface est un très bon cru.

« Vraiment, je ne sais pas pourquoi j’aime la Russie. Je l’ai découverte par hasard, un peu hagard, et elle s’est imposée. Je cherchais une terre d’asile, de nouveaux horizons. Je voulais aussi cultiver une certaine manière de vivre, généreuse et un peu triste. Je voulais l’immense, le froid, le farouche et le grand. » : Cédric Gras a eu tout cela.
Il le raconte d’une façon très vivante et nous fait formidablement ressentir toutes ses impressions dans un texte très structuré, bien écrit et vraiment agréable à lire.

Si un voyage dépaysant en diable vous tente, si une plongée dans une autre façon de vivre, de travailler et de penser vous tente, inutile de résister : embarquez pour Vladivostok.
Cédric Gras vous servira de guide et le fait qu’il soit recommandé par Sylvain Tesson est un sérieux gage de qualité.
Alors n’hésitez plus, larguez les amarres !
En route pour le grand Nord… oh, pardon… le grand Est !


Littérature française

Ce que j’appelle oubli

Ce que j’appelle oubli de Laurent Mauvignier, 2011


Ce texte est constitué d’une seule phrase, mais quelle phrase !
Elle court de la page 7 à la page 62… Proust peut aller se rhabiller…

L’auteur s’est librement inspiré d’un fait divers atroce qui eut lieu à Lyon en 2009 : un homme entre dans un supermarché, se dirige vers les boissons, prend une canette de bière et commence à boire.
Très banal, me direz-vous.
Mais ce qui l’est moins, c’est que l’homme en est mort.
Oui, mort.
Mort pour avoir bu une canette de bière dans un supermarché !

Dans un texte littéralement à couper le souffle, Laurent Mauvignier nous plonge dans l’horreur la plus aigüe, dans la barbarie la plus inhumaine.
Ils s’y sont mis à quatre.
Quatre vigiles qui ne se sont pas contentés d’arrêter l’homme (jamais nommé) comme leur fonction l’aurait voulu, mais se sont acharnés sur lui, et l’ont battu à mort.

C’est en apnée qu’on lit ce livre, cette phrase terrible, puissante, qui nous emporte dans ce que l’Homme peut avoir de pire, dans une spirale de violence inouïe.
 » et ce que le procureur a dit, c’est qu’un homme ne doit pas mourir pour si peu,… »
Non, un homme ne doit pas mourir pour si peu !

Une unique phrase, étourdissante, pleine de force et qui résonne comme un long cri d’indignation et de révolte.
Un concentré d’inhumanité, d’humanité et de littérature en une seule phrase.
Une lecture bouleversante.

Littérature française, Sport

Mbappé, le phénomène

Mbappé, le phénomène d’Arnaud Hermant, 2019


Kylian Mbappé est un phénomène, c’est indéniable.
À même pas vingt ans, il a explosé avec l’équipe de France et a grandement contribué à la victoire en coupe du monde en 2018.
Amatrice de foot de longue date, j’ai été grandement impressionnée par ses performances sur le terrain, bien sûr, mais tout autant par sa facilité à répondre aux journalistes.
À son âge, beaucoup auraient été intimidés et maladroits, auraient bafouillé deux ou trois platitudes, mais pas Kylian. Il enchaînait les réponses sensées avec un naturel confondant comme un vieux briscard rompu à cet exercice.
Oui, Mbappé est bel et bien un phénomène !

La lecture de ce livre fait comprendre au lecteur pourquoi Kylian est ce qu’il est.
Il a des talents naturels, certes, mais ceux-ci ne suffisent pas à tout expliquer.
Un élément essentiel apparaît très vite, ou plutôt deux éléments : ses parents.
Le jeune garçon a été élevé dans le respect des règles, des adultes en général et des enseignants en particulier.
Tout ceux qui l’ont côtoyé le reconnaissent : d’anciens professeurs témoignent qu’il était blagueur mais respectueux, le président de la FFF souligne qu’il s’est très vite intégré dans le groupe parce qu’il est simple et respectueux.

Ce livre a fait partie de mes lectures de vacances, période pendant laquelle j’aime alterner lectures légères et lectures sérieuses.
Cet ouvrage a été bien distrayant, mais pas seulement.
La fan de foot que je suis a aimé en apprendre plus sur un joueur que j’adore voir évoluer sur le terrain, mais j’ai également beaucoup apprécié tout ce qui est détaillé sur son éducation.
J’ai trouvé ces parties très instructives, non seulement pour comprendre le personnage, mais aussi parce que ce que j’ai lu conforte ce que je pense en tant que maman : on ne rend pas service aux enfants en étant laxiste mais en étant exigeant dans le bon sens du terme. Bienveillant, oui, mais pas la bienveillance à la guimauve dégoulinante qui semble à la mode…

Juste un exemple.
Les jeunes du club de foot dont était responsable Wilfrid Mbappé (père de Kylian) devaient montrer leur carnet de liaison du collège avant chaque entraînement et chaque match. S’il y était mentionné qu’ils n’avaient pas bien travaillé ou qu’ils s’étaient mal comportés, ils étaient privés de foot.
Et comme par magie tous se sont mis à bien travailler et bien se comporter… ce qui n’a pu leur apporter que du positif dans leur vie.

Un livre intéressant, rempli d’anecdotes et plutôt bien écrit.
Une lecture sympathique pour les amateurs de foot… et les autres.